"ORIGINE" - NHP/Neuchâtel
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Le projet « Origine » se compose de deux lustres constitués chacun de 129 lampes, identiques à celles que l’on trouve dans l’ensemble des chambres de l’hôpital. A l’intérieur de chaque lustre, un tube lumineux palpite discrètement à un rythme synchrone, que modulent les entrées et sorties par la porte principale de l’hôpital (un battement lumineux supplémentaire).
« Origine » est conçu en hauteur dans la perspective d’ensemble des deux corps de bâtiment (ancienne et nouvelle ailes) : le visiteur qui pénètre dans le hall d’entrée (bâtiment de 1811) peut se sentir écraser, pris de vertiges, en voyant l’aile nouvelle, par le plafond en verre. Aussi les lustres doivent-ils jouer un rôle de transition entre la différence de hauteur des deux constructions.

Ces lustres, de par leurs éléments constitutifs, utilisent la capacité de reconnaissance du visiteur pour créer un réseau de vecteurs rayonnant dans toutes les chambres. Placés au centre névralgique de l’hôpital (lieu d’entrées et de sorties), ils sont comme les deux cœurs qui distribuent et reçoivent le sang à l’ensemble du corps. A travers cette communauté de lampes, chaque lampe étant perçue comme métaphore du patient, ces lustres et leur palpitation condensent la vie et l’activité de l’hôpital.
La position suspendue d’« Origine » renvoie au point de vue particulier du malade alité, qui regarde le monde en contre-plongée et pour qui le cours du temps est associé singulièrement à la vie des plafonds. Loin de son domicile habituel, le patient recrée, par construction mentale, sur la surface blanche du plafond, son monde et son passé, qui deviennent comme des objets satellitaires qu’il a loisir de faire tourner à sa convenance.
Plus que la forme en elle-même de ces lustres, ce sont les éléments constitutifs, tous identiques, qui importent, en ce sens que si d’abord on tente de comprendre cette forme, très vite on est renvoyé d’un élément à un autre en se mettant à tourner suivant la répétition des lampes et finalement amené à participer à cette forme plutôt qu’à l’identifier.
La nuit, ces lustres, visibles pour les patients, depuis leur chambre, au travers de la verrière, accompagnent l’hôpital comme deux lunes et se mettent en orbite le long du globe qu’esquisse la courbe de la nouvelle aile, en emportant avec eux le bâtiment où ils sont suspendus. Ils prennent une figure de veilleuse et symbolisent la présence continue du corps médical.
Le blanc des lampes et de la lumière qu’elles diffusent veut évoquer les notions de calme et de méditation. Si les deux lustres, de par leur forme imposante, doivent attirer l’attention du patient ou du visiteur, le blanc a pour fonctions non seulement de happer l’angoisse ou l’impatience et de rendre des sentiments de sérénité et d’apaisement, mais aussi de livrer une surface lumineuse sur laquelle le patient ou le visiteur, nouvellement conditionnés, peuvent récrire leurs pensées.
La simplicité du procédé adopté et la légèreté de l’intervention, forment un objet d’une nature ambiguë et ouverte, qui convie chacun à reconnaître, à interpréter, et à participer.
Matthieu Pilloud/Vincent Eigeldinger - 2002

